Les produits laitiers

Yaourth

Le yaourt est un produit de la fermentation du lait, procédé très ancien qui remonte aux temps préhistoriques.

Comment l'homme l'a-t-il découvert ? Mystère... On imagine volontiers un jeune berger, à la fin du néolithique, s'apercevant que le lait contenu dans sa gourde a caillé.

L'on sait que l'usage des laits fermentés remonte au moins à la domestication des animaux. Qu'il a commencé en Eurasie, chez les Buschirs, les Tartares, les Kirghizes, les Kalmoucks, amateurs de lait de jument fermenté, le koumys.

Ces nomades offraient une sorte de yaourt aux anges tutélaires et aux étoiles protectrices.

Aux temps bibliques, il est reconnu pour ses pouvoirs bienfaisants. Abraham lui doit sa longévité ; Moïse le considère comme un don de la nature, à l'égal du miel et du vin.

Pendant l'Antiquité, Pline remarque que les Barbares savent "épaissir le lait en une matière d'une agréable acidité". Il cite le yaourt comme étant "d'essence divine" et comme remède à de nombreux maux. 

Cependant, la consommation généralisée de yaourt en Occident reste relativement tardive.

En France, on la doit d'abord, sous forme d'une brève apparition, à François 1er.

Souffrant probablement d'une infection intestinale, Sa Majesté fut guérie par la cure d'un laitage mystérieux, administrée par un médecin turc qui refusa d'en livrer le secret. C'était du yaourt au lait de brebis !

Il faudra attendre la fin du XIXe siècle, lorsque la science découvre l'action des ferments lactiques. Le savant ukrainien Metchnikoff (1845-1916), naturalisé français et prix Nobel en 1908, s'interrogeant sur la croyance qui attribue au yaourt la longévité des montagnards du Caucase et des Balkans, découvre ses effets curatifs sur les désordres intestinaux des nourrissons.

Au XXe siècle, le yaourt arrive en force sur nos tables.

En 1917, Isaac Carasso commence à produire du yaourt à Barcelone selon des procédés industriels. La même année, la première unité industrielle voit le jour en France à Levallois. Glorifié pour ses vertus diététiques, il est l'un des produits les plus appréciés, tel quel, ou en cuisine, notamment allégé.

La consommation de yaourts et de laits fermentés s'élève en France à 1,196 millions de tonnes en 2000. Soit 20,3 kg par an et par habitant (20,2 en 1989).

Parallèlement, notre dernier quart de siècle, avec le déclin de la cuisine familiale, voit l'explosion de la consommation des desserts lactés prêts-à-consommer.

Ces préparations industrielles s'inspirent de recettes traditionnelles ou créent d'innovants mariages de saveurs, de textures, de goûts sur la base incontournable de lait ou de ses dérivés.


La fabrication


Le yaourt, produit vivant, est un lait fermenté

Après la standardisation du lait (pour la rectification du taux de matière grasse), sa pasteurisation (traitement thermique) et son homogénéisation (répartition homogène des particules de matière grasse dans le lait), le lait est prêt pour la fabrication des yaourts. Il peut être écrémé, totalement ou partiellement, ou non.

On l'enrichit éventuellement en matière sèche, c'est-à-dire en poudre de lait, pour en améliorer la consistance. Puis on le refroidit à la température de 42-44°C.
On l'ensemence ensuite avec deux bactéries spécifiques : le Lactobacillus bulgaricus et le Streptococcus thermophilus. Le premier lui apporte son acidité tandis que le second développe ses arômes.
A partir de là, les procédés de fabrication diffèrent selon la texture désirée : ferme, brassée ou liquide.

Le yaourt "ferme"

Après l'ensemencement, il est conditionné en pots qui passent à l'étuve (42°-44°C).
Pendant trois heures, les bactéries se reproduisent par millions et s'attaquent au lactose qui est transformé partiellement en acide lactique qui modifie la structure des protéines, qui forment alors un gel.
Lorsque les yaourts ont atteint le degré d'acidité voulu (80-90° Dornic), ils passent en chambre froide ventilée ou en tunnel de refroidissement, et sont stockés à 2-4°C.

Le yaourt "brassé"

A la différence du précédent, sa fermentation ne s'effectue pas en pots, mais en vrac, dans des cuves. Lorsque l'acidité atteint 100 degrés Dornic, le caillé est brassé puis refroidi avant d'être conditionné en pots, qui seront stockés en chambre froide.

Le yaourt "à boire"

Sa texture est liquide, justement pour lui permettre d'être bu aisément. Après avoir été brassé, il est battu dans les cuves, avant d'être conditionné.
La DLC (date limite de consommation) du yaourt ne peut être postérieure de 28 jours à la date de fabrication, car ses bactéries caractéristiques doivent rester vivantes.
Un yaourt contient au minimum 10 millions de bactéries lactiques vivantes par gramme ! Produit vivant, le yaourt se distingue du "produit" thermisé dont on cherche à allonger la durée de conservation avant la consommation, en tuant sa flore bactérienne, ce qui lui interdit de porter la dénomination yaourt qui s'attache à définir un produit "vivant".
Un yaourt peut se décliner avec un taux de matière grasse variable, selon celui du lait utilisé pour sa fabrication.
Il peut être sucré ou non. Il peut contenir des ingrédients qui en modifient le goût : morceaux de fruits, miel, confiture, arômes naturels ou de synthèse autorisés.

Les autres laits fermentés

Le lait fermenté existe depuis des millénaires. Le lait Ribot, un lait baratté, est une spécialité gauloise ; le kéfir, ou " yaourt des centenaires" du Caucase est très consommé au Moyen-Orient ; le koumys, boisson d'Asie centrale, se prépare à base de lait de jument, d'ânesse ou de chamelle.

Les laits fermentés d'aujourd'hui ont des procédés de fabrication globalement identiques à ceux du yaourt. Simplement, ils n'ont pas droit à l'appellation "yaourt" car ce ne sont pas les mêmes bactéries qui assurent la fermentation du lait.

En 1899, une nouvelle bactérie était identifiée par l'Institut Pasteur : le Bacillus bifidus communis. Aujourd'hui, on a isolé plusieurs sortes de bactéries répondant au terme générique de bifidus.
Les plus célèbres sont le Bifidobacterium longum et le bifidum, présentes dans l'intestin des nouveau-nés.
En 1978, les Japonais utilisèrent les premiers cette bactérie dans les produits laitiers.
La France fit de même en 1981 avec la commercialisation du premier lait fermenté au bifidus.
Il existe aussi des laits ensemencés avec le Lactobacillus acidophilus (lait à l'acidophilus).

Les desserts lactés frais

Ce sont des préparations comportant une forte proportion de lait ou de crème, mélangés à d'autres ingrédients (sucre, riz, semoule, parfums et arômes...).

Ce qui permet de consommer du lait sous mille et une formes différentes : crèmes, flans, mousses...
Ces spécialités dont le nombre ne cesse de croître chaque année sont fabriquées selon divers procédés. 

Les laits gélifiés et les crèmes dessert

Ils sont obtenus en ajoutant au lait des agents de texture autorisés, épaississants ou gélifiants, dont la proportion ne doit pas excéder 2%.
Lorsque le produit est obtenu avec plus de gélifiant que d'épaississant, il s'agit d'un lait gélifié, c'est-à-dire d'un flan. Dans le cas contraire, c'est une crème dessert.
Certaines préparations intègrent des oeufs et/ou de la crème telles les mousses, crèmes brûlées ou îles flottantes.

Les laits emprésurés

Ils sont constitués de lait caillé avec de la présure, additionné d'arômes naturels.

Les glaces

Trois sortes de glaces ont place parmi les produits laitiers frais : les "glaces à la crème" dites aussi crèmes glacées ou "ice creams", les "glaces aux oeufs" et les "glaces au lait". 

Crème glacée

On les obtient en congelant un mélange de lait pasteurisé et de saccharose auquel on ajoute d'autres ingrédients : arômes, extraits de fruits, stabilisants et colorants.
Pour avoir une consistance légère, elles peuvent être foisonnées : le mélange à glacer est fortement battu pour incorporer, de manière homogène, de petites bulles d'air. 

Les autres desserts

Fruit d'une innovation constante de la part de l'industrie laitière, plusieurs recettes originales, familiales ou traditionnelles, sont aujourd'hui fabriquées industriellement.
Ce sont les riz au lait, les gâteaux de semoules, les clafoutis, mousses, profiteroles et autres îles flottantes... Le soin apporté à leur fabrication en font des desserts lactés sains et gourmands à la fois.

Les dénominations


Yaourts et laits fermentés

C'est en 1925 que les mots "yaourt" ou "yoghourt" ont fait leur entrée officielle dans le Petit Larousse. Le premier est d'origine grecque, le second d'origine turque (yog'hurt)

Les deux termes sont reconnus par la législation européenne. Ils ne peuvent convenir qu'à un lait fermenté avec ces bactéries caractéristiques :
Lactobacillus bulgaricus et Streptococcus thermophilus.
Bactéries qui doivent demeurer vivantes jusqu'au dernier jour de la DLC. De plus, la quantité d'acide lactique libre contenue dans 100 g de yaourt ne doit pas être inférieure à 0,7 g.

Cependant, depuis le 14 juillet 1988, la dénomination peut également s'appliquer au yaourt surgelé. Le "yaourt surgelé" doit répondre à certaines caractéristiques. Notamment, les bactéries mises en hibernation doivent être reviviscentes après la décongélation. La "glace au yaourt" ne peut utiliser le terme yaourt que sous les mêmes conditions. 

A partir de ces caractéristiques de base, le yaourt peut garder son appellation, même s'il n'est pas de goût nature. A condition de répondre à certaines conditions : s'il est enrichi d'ingrédients (sucre, fruits, miel, arômes..), ceux-ci doivent être autorisés par la législation. En tous les cas, ils ne peuvent dépasser la proportion de 30%. L'addition de stabilisateurs, hormis certains conservateurs des fruits, est interdite.
On trouve ainsi sur le marché toute une déclinaison de produits ayant droit à l'appellation yaourts : "yaourts sucrés", "yaourts aromatisés", "yaourts aux fruits" etc.

Produit vivant, 100 g de yaourt nature contiennent en moyenne 6 g de glucides, 4 g de protides, 0 à 3,5 g de lipides, selon le lait utilisé. On y trouve encore du calcium, des sels minéraux (phosphore, potassium) et des vitamines produits par les bactéries : B1, B2, et PP.

L'appellation "lait fermenté" est réservée à des laits ensemencés avec d'autres bactéries que celles qui sont spécifiques au yoghourt.
Le nom de la ou des bactéries impliquées dans la fabrication du produit doivent figurer sur l'étiquetage.
Les laits fermentés comportent un peu moins d'acide lactique libre que le yaourt (0,6% au lieu de 0,7%), ce qui leur donne un goût plus doux. En résumé, le yaourt est un lait fermenté, mais tous les laits fermentés ne sont pas des yaourts !

Les desserts lactés frais

Ils sont étiquetés sous leur nom usuel ou sous forme codée.
L'utilisation des additifs est soumise à la législation européenne qui a été est reprise dans le droit français. 
Ce sont des agents de texture épaississants ou gélifiants, des arômes, des colorants (produits naturels extraits de plantes ou de fruits par seul traitement physique), des antifongiques (sorbates) pour éviter la contamination par des levures ou des moisissures.
Leur innocuité a, depuis longtemps, été prouvée. Leur dosage et leur qualité sont réglementés. 


Les bons usages

Pour son goût, il est vrai que le yaourt ne peut rivaliser avec la crème ou le lait. Cependant il est utilisé en cuisine depuis longtemps par les Orientaux qui le boivent comme boisson glacée, battue avec un peu d'eau.
Ils apprécient aussi sont pouvoir liant dans les sauces. Soit froides, additionnées d'herbes, d'épices, de crudités (cacik turc, raïta indienne...).
Soit chaudes, notamment en cuisine indienne où il est beaucoup utilisé dans les carys.
Les Syriens, les Turcs et les Afghans l'emploient dans la cuisson des légumes et des viandes, dans la préparation des potages et des sauces, notamment pour les brochettes grillées.

L'arrivée d'une cuisine plus légère et mieux adaptée aux besoins caloriques des consommateurs lui a redonné une place particulière dans la cuisine française. Aujourd'hui, les cuisiniers le considèrent un peu comme une doublure moins calorique de la crème.

A froid, mis à part le foisonnement impossible, on l'utilise dans les sauces, les farces, les potages, les mousses, les marinades, les coulis...
Il donne aux préparations un petit goût acide, caractéristique, et présente un grand intérêt diététique.

A chaud, il offre de nombreuses possibilités. On le mélange en finition dans les purées, les sauces et les potages.
Avec la fécule de pomme de terre ou de maïs, avec le jaune d'oeuf et éventuellement le vin blanc, il intervient dans la liaison finale des sauces.
On peut l'ajouter à la crème et à la fécule quelques minutes avant la fin de la cuisson. Il est alors préférable d'employer du yaourt brassé.

En garniture, on peut l'incorporer dans des appareils à crème prise à condition d'éviter les cuissons violentes ou prolongées. On peut l'utiliser pour certaines marinades (le poulet tandoori, par exemple), ou l'intégrer dans des farces à cuire.

En pâtisserie, il a une place de choix et entre dans la composition de nombreux desserts : gaufres, cakes, crêpes, biscuits simples, pain, soufflés, bavarois, glaces...

D'une manière générale, en cuisine, il est préférable d'utiliser le yaourt à température ambiante, après l'avoir préalablement brassé.

Mythes et réalités

Le yaourt est décalcifiant ?

Faux : Il apporte, au contraire, 160 à 174 mg de calcium pour 100 g, sous une forme particulièrement assimilable.

Le yaourt se digère bien ?

Exact : Grâce à sa flore vivante qui modifie la structure des sucres et des protéines, il est particulièrement digeste.

Les desserts lactés frais ne sont pas de vrais produits laitiers ?

Faux : S'ils contiennent d'autres ingrédients que le lait : sucre, fruit, oeuf, crème, épaississants, la part du lait reste toujours importante assurant un bon apport de protéines et de calcium.


Source : La maison du lait